Paris, janvier 2014. En partant le matin, je m’arrête dans une boulangerie où j’achète un croissant aux amandes et un truc emberlificoté avec des grains de chocolat dont je me rappelle jamais le nom. En sortant de la boutique, tout de suite à droite, j’aperçois un monsieur qui fouille dans les poubelles.
Et là forcément je me sens tout con, avec mes viennoiseries bien chaudes, mon éducation bourgeoise et mes privilèges sociaux.
Aussi je m’approche et je l’interpelle :
– Monsieur ? …Monsieur ?
Il ne répond pas. Peut-être n’est-il pas habitué à ce qu’on l’appelle par ce titre ? ai-je tôt fait de conclure, sans fondement.
– Monsieur… ?
Il tourne finalement sa grosse tête, rouge et hirsute, dans ma direction, tout en la maintenant engagée sous le capot de plastique vert.
– Excusez-moi… vous cherchez à manger ?
Je pose la question comme ça, avec l’intention d’expliquer pourquoi je m’apprête à lui proposer mes viennoiseries… Mais ce n’est qu’une fois cette phrase prononcée que je réalise ce qu’elle peut avoir d’inconvenant lorsqu’on l’adresse à quelqu’un qui fouille dans une poubelle. Je me sens mal tout à coup, envahi d’une telle bouffée de honte qu’il faudrait me colorier de rouge, vif, des pieds à la tête, si seulement j’étais un personnage de BD… Alors, dans le même élan et pour enchaîner le plus vite possible avant de déguerpir, je lui tends mon petit sac de papier blanc-graisseux :
– Tenez, c’est pour vous !
Le monsieur est tout hébété. Il recueille le petit sac, l’examine en me remerciant, puis relève la tête vers moi et me demande, interloqué :
– Mais… et toi ? Qu’est-ce que tu vas manger ?
« La générosité de la misère » => Superbe anecdote :) Keep it true old soul bro… See you later.