Comme tout le monde, j’espère, je suis sous le choc.
Hier ce n’était pas encore évident pour tous… Quand je suis sorti de chez moi, en larmes, pour rejoindre le rassemblement, place de la République, il y avait encore des gens qui faisaient du shopping et vaquaient à leurs occupations. Je me suis demandé s’ils n’avaient pas compris ce qui s’était passé ? Et puis je me suis dit que j’étais intolérant, que je n’avais pas le droit de les juger et j’ai poursuivi ma route à la recherche de ma « famille » : ceux que le drame accablait.
Une telle division n’existe pas : nous sommes TOUS dans le même bateau. L’attaque de Charlie pourrait marquer un tournant irréversible dans notre histoire.
Ceux qui pensent que les auteurs « l’ont cherché » ne réalisent pas ô combien ces types étaient des remparts pour les protéger de la haine. On peut facilement abattre des auteurs désarmés, mais ce n’est plus la même chose s’il pousse à la place des uniformes, des mitraillettes ou des camps.
Ceux que l’événement indiffère ne réalisent pas l’importance du combat menés par ces auteurs, aux frontières de la liberté d’expression. On n’est pas tous obligé d’adhérer à leurs caricatures, on doit tous adhérer à l’impunité qu’ils avaient de les dessiner, vis-à-vis des lois comme des représailles : sans quoi c’est un morceau de liberté qu’on cède… comme un segment de corde qu’on laisse filer entre nos mains. Car la liberté n’est pas un acquis mais l’objet d’un combat perpétuel ! Il ne faut pas en céder le moindre bout, sans quoi c’est la corde qu’on cède ! Hier les tueurs ont tenté de nous en arracher un morceau de force… A cela j’espérais que les Français réagissent avec la férocité d’un chien à qui l’on arrache un os, tous, en dépit de l’affection qu’ils avaient ou non pour les auteurs de Charlie. Mais comment le peuple français allait-il réagir ? Allait-il le défendre cet os ? Le laisser échapper sans combattre ? Allait-il tomber dans le piège de l’intolérance en dépit des valeurs défendues par les assassinés ?
J’avançais vers la place de la République avec appréhension…
Place de la République. Je me fraye un chemin jusqu’à la statue. Il y a du monde, mais la place est encore silencieuse. Des chants partent de la statue mais s’estompent. Je me joins à ceux qui ont besoin de hurler. La place, déjà remplie se met à déborder. Nous chantons, nous gueulons, des chants simples avec toute l’énergie du cœur. Il y a des personnes de toutes couleurs et de tout âge à mes côtés, des accents d’ailleurs qui répètent les mots français :
« Nous sommes Charlie ! »
« Charlie ! Charlie ! Charliberté ! »
« Charlie vivra ! Charlie vivra ! »
« Ensemble, unis, pour la démocratie ! »
Et celui qui m’a le plus touché : « On n’a pas peur ! »
Pourquoi celui-là ? Parce que c’est pour moi la réponse la plus évidente à donner aux tueurs. On n’a pas peur. On n’a pas peur ! Vous n’avez pas affaibli ce que vous cherchiez à combattre, vous l’avez renforcé. Les appréhensions que j’avais au moment d’arriver sur la place ont disparu en son cœur : pas de haine, je n’en ai vue nulle part. Que de l’amour, de la solidarité et de la force. La Marseillaise, chant que je respecte et que j’aime pour sa valeur historique et symbolique, mais chant de guerre ô combien sanglant, n’a pas prise. Lancée à trois reprises, elle a été couverte par des appels à la « Liberté d’expression ! Liberté des crayons !! ». Donner du sang au sang ne nous mènera nulle part, et ce n’est pas la nation française qui a été frappée mais la liberté : elle appartient à tous ceux qui veulent la défendre.
Je suis heureux et fier de la réaction du peuple de la Liberté.
Je me permets ici de laisser quelques mots pour dire ce que je crois être l’essentiel : l’intention de tant de gens de vouloir manifester leur soutien, leur détermination en le faisant de manière visible par le biais de dessins, manifestations, photos est louable. L’homme est un animal communautaire après tout.
Mais je voudrais ajouter que le meilleur hommage qu’on puisse faire, la meilleure manière de lutter contre la barbarie, c’est avant tout de combattre l’intolérance et cela se joue dans l’esprit des gens.
Claire même pas peur.
Par contre je suis dégoutté je travaillait en 13h-21h ce jour la j’ai pas pu y aller la rage.