Un matin de janvier, dans le nord de Paris,
Je sortais, tout chargé, d’une boulangerie
Quand j’aperçus quelqu’un plongé dans les poubelles :
Un homme se battait contre un capot rebelle
Qui l’avait avalé de la tête à la taille…
Parce qu’il avait faim, l’homme livrait bataille.
Et moi j’étais planté à quelques pas de là,
Muet, les bras chargés de pains au chocolat.
Cependant mon prochain rudoyait le plastique,
Démasquant, par ses coups, le démon sarcastique
Qui régit Babylone et divise les gens
Selon qu’on les pourvut ou les privât d’argent.
A moi il m’en restait au moins quelques tiroirs
Et le triste spectacle avait, comme un miroir
Réfléchi mon image. Ainsi je me voyais :
Naïf petit bourgeois, propre et privilégié,
Que le destin chérit de l’aube au crépuscule;
Bienheureux citoyen du petit groupuscule
Qui ignore la faim, la soif, la maladie…
L’injuste iniquité, soudain, je la maudis.
Monsieur ? Intervins-je sans que l’homme me voie.
Monsieur ? Tentai-je encore en élevant la voix,
Assez pour qu’il réponde enfin à cette adresse
Et que de recourbé, tout à coup, il se dresse.
Le teint rougeaud, l’œil flou, le nez tout rabougri,
Une barbe chenue avec des cheveux gris :
Son masque de visage était tendu, hagard…
Et je cherchais en vain l’homme dans le regard…
« C’est pour vous, prenez-les » lui dis-je en lui tendant
Ce petit quelque chose à mettre sous sa dent :
Trois pains aux chocolats. Vraiment, une broutille !
Un geste. Tout au plus: une intention gentille.
Ses lèvres se bousculent… j’entends qu’il balbutie
Quelques mots spontanés… veut-il dire merci ?
Mais ce pauvre vieillard, mal vêtu, mal logé
S’enquiert, tout simplement : « Toi, que vas-tu manger ? »
Je ne te savais pas poète ! J’aime beaucoup :)
Merci l’ami ! =)
C’est un plaisir la veille d’un premier de l’an
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