On m’avait prévenu: Mexico city, c’est le far-west, tu vas te faire braquer, racketter, dépouiller… Ca n’a pas loupé! Dès mon arrivé à l’aéroport, ces salauds m’ont soutiré trois pesos (20 centimes d’euros) pour m’autoriser à prendre le métro. A part ça, rien. Pas le moindre pépin. Moi qui cherchais un peu d’aventure…
Au contraire, c’tait tout calme. On y est en été comparé au Japon, et en fournaise comparé à la Chine: j’ai remis dare-dare mon joli short bleu ciel, couleur de vacances et d’espoir, couleur de c’était le dernier modèle qu’ils avaient en magasin pour aller me promener dans les rues piétonnes de la ville: la dangereuse Mexico City. Il y régnait un air incroyablement familier, et je ne savais dire, les amis, je ne savais dire si c’était celui de la Thaïlande, de l’Inde, de Barcelone ou de la Louisiane… Mais il est vrai que sous certains aspects on aurait pu se croire en Espagne, avec ces bâtiments romains et ces statues grecques qui ponctuent les rues et les jardins; ou en Inde, avec ces couleurs colorées (muuuses!) sur les murs des maisons, quand elle se répandent sur les gens… A tous les coins de rues, des Mexicains se kidnappaient la langue ou se rackettaient la bouche à mains désarmées: les seuls délits dont j’ai été témoin; et ça m’a choqué (culturellement) arrivant de pays (d’Asie) où il faut tout cacher, que les couples s’exposent aussi librement.
L’autre truc qu’on trouve aux coins des rues ce sont des grappes de policiers, tous équipés de gilets pare-balles, malgré la chaleur, et armés jusqu’aux dents. Tu m’étonnes qu’y ait pas d’ennuis: j’en ai même vu passer à cheval avec des sombreros… encore plus impressionnants! Mais pas trop quand même, car la plupart d’entre eux tapent la discute, font du shopping ou boivent des jus de fruits.
Les flics les plus efficaces, dans ce pays très chrétien, c’est Sainte Marie et la bande à Jésus: les autorités ont découvert qu’en plaçant leur effigie dans la rue elles y réduisaient considérablement la saleté et la violence, les malfrats hésitant à malfrater ou à jeter des papiers par terre sous les yeux de Dieu (mais quand Dieu regarde pas c’est bon).
Je dois admettre que le Mexique, à travers son histoire, à l’air d’entretenir un singulier rapport (oui Mesdames et Messieurs: singulier!) avec la violence, la plupart de ses épisodes historiques étant représentés dans les musées ou les arts locaux par de vastes boucheries, qu’il s’agisse des mœurs Aztèques, de la chute de leur empire, de la guerre d’indépendance ou des révolutions mexicaines, ça fusille et ça se tue: de quoi choquer la sensibilité du bon Français, issu d’un peuple ô combien pacifique, s’il en est.
Le Mexicains aussi sont pacifiques, en tout cas sur la côte ouest où j’ai décidé de me rendre après quatre jours passés dans la capitale à boire des jus de fruits frais; marcher au soleil de la rue pour observer des gens Mexicains; sortir faire la fête sans trouver d’autre fête (Mexico n’est pas Barcelone!) que des attroupements de mariachis désœuvrés (ces musiciens de rue en tenue folklorique que l’on paye pour qu’ils chantent des chansons ou jouent de la musique sur laquelle on chantera: une sorte de karaoké live) et surfer sur internet pour promouvoir mon EXCELLENT roman aujourd’hui paru et que vous allez me faire le plaisir d’offrir tout de suite à votre famille pour Noël (même si c’est déjà fait et que c’est plus Noël): INDIANA TOM – Le rapport de stage perdu –.
A merde, j’oubliais: je suis aussi allé voir Théotihuacan. Car le Mexique, je précise pour les plus ignorants d’entre vous (et ils sont nombreux) n’a pas toujours était peuplé par des Mexicains: il fut aussi peuplé par des Mexico, l’autre nom des Aztèques. Tout le monde sait qu’ils fondèrent une ville à l’endroit où un aigle bouffait un snack, perché sur un cactus, blabla, allez lire Wikipédia! Ce que vous apprendrez en exclusivité sur l’EXCELLENT Nabolo-blog c’est que les Aztèques n’étaient pas seuls, et que le Mexique grouillait de civilisations précolombiennes, organisées sous-forme de Cités-Etats (genre à la grecque), qui se sont chevauchées les unes les autres avant même que le cheval ne soit introduit par les Espagnols en 1517 (on a même retenu la date, c’est vous dire: les Espagnols n’introduisaient pas le cheval tous les jours!). Il n’y avait donc pas une unique civilisation sur place, mais un paquet de petites, certes dominées par celle des Aztèques, avec qui elles partageaient de nombreux points communs… EN TOUS CAS, Théotihuacan n’est pas une ville Aztèque: c’est une ville Théotihuacaise, contrairement à ce que croient la majorité des abrutis que vous êtes en voyant les photos de ce site, non pas web mais archéologique.
Je suis donc parti sur la côte grâce à des gens aux noms bizarre (j’aime bien les gens aux noms bizarre: ils en ont pris plein la gueule au collège et ça les a rendu moins cons). Le premier s’appelle Yiorgos; c’est un anglo-grec fan de treks en montagne; la deuxième Farhane, une irano-allemande fan de surf en océan. On s’est connu dans une auberge de Mexico et chacun allant dans une direction différente il me fallut trancher le nœud gordien… Mais les deux m’étaient également sympathiques, alors qui suivre? La Nazi-terroriste ou le Rozbif-pédé? (cet article commence sérieusement à avoir la classe)
J’ai opté pour l’option surf finalement, plus prometteuse en découvertes pour moi qui n’en ai jamais fait…
Surfing MPC
…ou presque, parce que j’ai déjà eu la chance de boire la tasse à Hossgore et à la Réunion (ça vous forme un surfer mine de rien!) et je savais déjà que le surf n’est pas un sport de fillettes contrairement à ce que j’ai longtemps cru, et que pagayer à la main pour faire avancer sa planche n’est pas sans faire chier.
Arrivé au paradis (ce qui signifie, dans le petit monde des backpackers: « une plage avec des cocotiers ») j’ai pris ma planche sous le bras et j’ai couru vers le grand bleu… Plus exactement j’ai pris ma planche sous les deux bras (on m’a refilé une planche pour débutant qui fait deux fois ma taille) et j’ai trébuché jusque dans l’eau. Puis j’ai pagayé, pagayé, pagayé… Jusqu’à rejoindre mes frères de lames, ces autres surfers qui attendaient en groupe à une distance raisonnable de la plage, assis sur leurs planches, que l’océan se déchaîne.
Je dois reconnaître (même si ça irrite ma modestie naturelle) que j’ai pas mal surfé pour une première fois. Mais je n’ai aucun mérite, le surf et le métier de figurant (dans lequel j’excelle) ayant pour principe commun d’attendre qu’il se passe quelque chose.
Et j’ai surfé comme ça, pendant des heures, parfois assis à califourchon sur ma planche, parfois couché dessus (les deux figures que je maîtrise le mieux) en attendant une vague.
Le soleil a commencé à décliner dans le ciel. Bientôt il ferait nuit, mais il faisait toujours bon. L’eau était chaude quoique de moins en moins claire, à l’instar du ciel où gambadaient des mouettes bizarroïdes, avec une sorte de poche sous le bec et d’autres, toutes noires, beaucoup plus grande que les mouettes normales de Carrie-le-rouet. Autour de ma planche et moi, de petits poissons se sont mis à sauter hors de l’eau pour que les mouettes à poche les attrapent. Ils faisaient un clapotis de dingue et je grondais:
– Mais butain les mecs, chut un peu, là! Vous voyez pas que vous allez faire fuir les vagues?!
Rien à foutre, ils s’en battaient l’écaille et je passais un petit moment à les observer.
Ces poissons volants n’avaient pas d’ailes (c’était donc des poissons sautant, les poissons volants ne volants pas mais sautant avec des ailes) et je les soupçonnais de chercher à attraper les insectes que le soir avait poussé au ras des flots, là où les mouettes pas normales iraient les pêcher… Tout allait bien (toujours pas de vague) jusqu’à ce que le soleil précipite sa course vers l’horizon… Et là, paf! C’est l’accident! L’imprudent se coupe sur une lame qui vient d’acérer la surface de l’eau… Il fout du sang partout! Du rouge vif dans le ciel et dans la mer dont la robe prend la couleur du deuil (noire, je précise). La vague assassine ne se contente pas de ce premier crime, elle grossit encore pour venir me menacer, moi: tuer le soleil ne lui suffit pas, elle veut aussi lui prendre son enfant dont le destin est sans pareil, que l’aventure appelle, même qu’il ne doit pas attendre et courir vers elle (cf: le générique des « Mystérieuses Cités d’Or », il fallait bien que je place une référence quelque part), elle est donc une serial-killeuse! VITE! Je bondis sur ma planche (j’étais là où j’avais pied) et j’attends. La vague explose en une myriade de chevaux blancs qui balancent leurs crinières d’écumes comme autant de panaches pour mener Océan, titan libéré, à l’assaut du continent et de la terre, sur ce char marin que les bêtes tirent avec la hargne de la revanche que mais putain muses! Muuuuuuses! Merde maintenant!! Ne me laisserez-vous donc jamais en paix?! Et donc je suis sur ma planche quand les coursiers de la mer m’invitent de force à les chevaucher. Ils propulsent ma planche avec une force qui la fait glisser sur l’eau comme sur le pavé mouillé (si, ça glisse bien le pavé mouillé) ce qui lui donne suffisamment de stabilité pour me permettre de me dresser dessus, comme un drapeau de conquête, comme un mât qui triomphe de la mer, comme la verge de Léopold Sédar Senghor je surfe mes amis je suuuuuuurf-ais! PLOUF!! (ou SPLASH! pour mes lecteurs anglophones).
Et voilà! C’est fait! Je peux ajouter une nouvelle ligne à la longue liste de mes aventures et de mes différents métiers: « surfer professionnel ». Surtout, je vais enfin pouvoir répondre « oui » à cette question qu’on me pose systématiquement: « Tu fais du surf toi, non? » sous prétexte que j’ai des longs poils jaunes qui me poussent sur la tête.
Ca le fait d’être surfer! En plus, quand tu ramènes ta planche dans ta case, personne sait si tu surfes bien: si t’es blond et mouillé avec un planche à la main t’es super crédible… et j’avais la plus grosse planche de la plage, quasi deux fois la taille des autres, trop la classe!
Epilogue: La nuit était couverte d’étoiles. Dans ce petit bout du monde qu’est Puerto Escondido, il y a peu de lumières jaillissant de la terre. Celles du ciel n’y parviennent que mieux. Cette escapade m’a fait du bien mais je commence à être fatigué de voyager plus ou moins seul. Il est peut-être temps de rentrer, pour vivre quelques aventures sédentaires… Peut-être avant de repartir? Je ferai le bilan plus tard. Hasta luego, je décolle pour Cuba, dernière étape avant mon retour dans l’arène de DOFUS ARENA et de la vie européenne (et je ne sais pas comment est l’internet là-bas).